Le fabricant d’armoires électriques Grolleau a doublé de chiffre d’affaires en deux ans. Son dirigeant Laurent Marbach compte encore fortement faire grandir cette entreprise de Montilliers, dans le Maine-et-Loire, en explorant d’autres secteurs d’activité et d’autres pays. Tout en conservant l’ADN de cette PME installée en milieu rural, loin des grandes villes. Propos recueillis par Olivier Hamard
Comment analysez-vous la croissance de l’entreprise Grolleau ?
Laurent Marbach : Nous travaillons dans des secteurs porteurs, comme celui de la fibre optique. Cela va durer environ dix ans puis il y aura le déploiement de la 5G sur lequel nous allons aussi nous positionner. En réalité, les marchés sur lesquels nous évoluons sont en augmentation et sont réellement prometteurs, ce qui explique notre croissance. Nous sommes passés de 17 M€ de chiffre d’affaires en 2016 à 33 M€ en 2018. Nous avons dû nous structurer en intégrant des cadres dans différents services, dans les fonctions support tout comme en R & D. Nous avons par exemple récemment intégré un ingénieur spécialisé dans les objets connectés. Nous avons aussi défini quatre segments distincts pour nos activités : les armoires urbaines, les armoires réseaux et télécoms, l’industrie et le transport [châssis ferroviaires, portes pour équipements marins, kiosques de péages routiers, NDLR] et enfin les énergies vertes [bornes de recharge de véhicules électriques, armoires de commande de trackers solaires, NDLR]. Pour chaque segment, nous avons mis en place une direction commerciale.
Avez-vous rencontré des écueils à ce développement ?
L. M. : Pour l’instant, on s’en sort bien, sans problèmes majeurs, et l’histoire est belle ! Même si notre situation pose la question des usines à la campagne : nous avons actuellement 180 salariés, auxquels s’ajoutent entre 40 et 50 intérimaires que nous essayons d’intégrer. Nous avons signé 20 CDI depuis le début de l’année. Mais nous sommes toujours confrontés à de réelles difficultés de recrutement, entre autres en rai-son de l’éloignement des bassins d’emploi. Il n’y a par exemple pas de transport en commun pour desservir la commune.
Votre activité historique est l’armoire de rue. Comment évolue ce secteur ?
L. M. : Dans ce segment que nous appelons « urbain », nous avons la moitié du marché des armoires en France, pour l’électricité, l’éclairage public, la signalisation ou le gaz. Le développement de la « smart city » va aussi ouvrir d’autres perspectives : les armoires vont devenir intelligentes. Nous avons anticipé et commercialisons déjà des produits connectés. De même, nous sommes entrés au capital de la Snoc, la société nationale des objets connectés à Angers, qui va nous apporter son expertise dans ce domaine. Ce secteur de l’armoire urbaine va donc continuer de se développer et devrait connaître une croissance d’environ 10 %.
Vos armoires sont-elles entièrement « made in Grolleau » ?
L. M. : Tout est conçu puis fabriqué dans notre usine, sans sous-traitance, depuis l’arrivée de la tôle jusqu’à la finition de l’armoire, en passant par l’intégration d’éléments électriques ou électroniques. Nous fournissons ainsi des éléments vides ou entièrement câblés selon la demande.
Les télécoms, qui représentent 50 % de votre chiffre d’affaires, sont-ils toujours un secteur porteur ?
L. M. : Là aussi, nous avons la moitié du marché français et nous fabriquons entre 700 et 800 armoires par mois. Nous sommes en effet l’un des deux fournis-seurs choisis par Orange pour le développement de la fibre optique dans les villes. De même, nous avons aus-si des contrats avec les sociétés qui la déploient dans les départements. Dès 2021, il y aura le virage de la 5G à ne pas rater, avec des armoires plus petites, mais avec plus d’éléments à l’intérieur. Sur ce segment, nous avons l’avantage, particulièrement sur des concurrents chinois, de pouvoir fabriquer des produits qui ne sont pas standardisés.
Vous fabriquez également des bornes de recharge pour véhicules électriques. Où en est cette activité ?
L. M. : Sur ce segment nous avons préféré revenir en rang 2, avec des produits fabriqués en marque blanche pour de grands noms du secteur qui les commercialisent eux-mêmes. L’an passé, cela a représenté un chiffre d’affaires de 4 M€. Cette année, nous serons plus autour de 2 M€, mais nous gardons un bureau d’études dédié à cette activité. Il y a beaucoup d’acteurs sur ce marché mais il va s’agréger et il est loin d’être terminé.
Grolleau travaille aussi pour une clientèle industrielle. Avec de belles perspectives ?
L. M. : Oui. Tous les feux tricolores de la ville de Paris sortent de notre usine, et nous fabriquons par exemple des portes pour bateaux. C’est une activité historique, avec des produits techniques, faits par des équipes dédiées, pour des clients comme Les Chan-tiers de l’Atlantique. Nous avons également codéveloppé avec la société Sanef des cabines de péage d’autoroute, produits qui devraient aussi nous ouvrir des perspectives.
Grandir dans vos quatre segments suffira-t-il pour atteindre vos objectifs ? Grolleau travaille aussi pour une clientèle industrielle. Avec de belles perspectives ?
L. M. : Le développement de nos quatre branches de production va y contribuer, mais nos leviers de croissance sont aussi dans de nouvelles activités et à l’export. Nous nous lançons maintenant dans l’activité de service, pour réparer ou mettre à jour des produits. Pour l’export, nous avons fait le pari de l’Afrique de l’Ouest. Nous avons créé une filiale à Abidjan, en Côte d’Ivoire, pour des armoires urbaines et de développement de la fibre. L’objectif est de faire la partie tôlerie ici et de réaliser ensuite le montage et l’intégration là-bas. Nous sommes déjà présents à l’étranger par l’intermédiaire de nos clients, comme le groupe Bolloré à Singapour avec des bornes électriques de re-charge. Mais notre part propre d’export ne représente que 2 %. Avec l’Afrique de l’Ouest, elle devrait augmenter et nous projetons de parvenir à 10 % de notre chiffre d’affaires, comme pour la partie services.